dimanche 30 mars 2025

Variation en Lego technic - Hercule






10 moteurs, 3 hubs, chenilles, rotation du corps, se penche en avant, tourne la tête, lève les bras, serres les pinces, ouvre la bouche et bouge les yeux!







vendredi 21 mars 2025

Techno féodalisme

 

L'oeuf de ténèbre des techno technos - L'Incal Moebius 

  • le techno féodalisme - un cadre d'analyse pour comprendre l'économie de marché du numérique et les évolutions des modèles d'affaire
Récemment est apparue dans le débat public la notion de techno féodalisme (cf article du monde). Cette analyse du capitalisme numérique a été popularisée récemment par l'économiste grec Yanis Varoufakis dans son livre "Les nouveaux serfs de l'économie". L'idée principale est que l'aboutissement de la domination des géants de la tech est la création d'une économie de rente. À leurs têtes, des PDG sont les barons féodaux, la plèbe devenant des serfs volontaires du clic fournissant les données personnelles qui font la fortune des géants de la tech.  L'excellent podcast Le code a changé "Le capitalisme est mort, vive le techno féodalisme!" explique très bien la notion. 

  • Le grand capital, numérique ou pas, le même principe d'accumuler de la richesse à son propre profit*  
Un ami m'avait expliqué que le génie de Google était d'avoir créé un modèle économique qui s'apparente à une taxe sur le clic où ce sont les annonceurs qui payent. La stratégie, bien connue maintenant, du "winner takes all" consiste à dépenser à fonds perdus pour devenir "LA" plateforme, monopole incontournable et créer cette économie de rente. Sur les réseaux sociaux, le côté obscur de la nature humaine a fait de la haine, du sensationnel et du vulgaire le moteur principal du côté "pute à clic". Comme je l'ai décrit dans un précédent post, la promesse initiale de transversalité des savoirs et de démocratie horizontale se transforme en dystopie néo réactionnaire "Réseaux sociaux - de l'utopie à une réalité inquiétante et des perspectives positives de l'espace civique mondial"

D'un point de vue économique, la première source de création de richesse est de s'insérer dans les failles de la réglementation, du droit du travail et des législations locales. Les couts de passage à l'échelle sont marginaux une fois l'algorithme ou les services numériques créés, idéalement en rendant captif le consommateur. Les profits s'en trouvent démultipliés à l'infini. D'autant plus infinis qu'ils ne sont pas taxés grâce à l'extraterritorialité inhérente au numérique et des montages fiscaux dans les paradis offshores moralement peu justifiables. En 2024, Alphabet, maison mère de Google domicilié aux Bahamas, a réalisé 100 Mds $ de bénéfice pour 350 Mds $ de chiffre d'affaire ce qui fait une marge hallucinante de 28%...  Ces deux phénomènes, associés à une arrogance disruptive, positionnent ces acteurs au-dessus des régulations nationales ou régionales, l'externalisation vers des tâcherons devient la norme (que l'on appelle pudiquement auto entrepreneurs). On leur transfère l'ensemble des risques anéantissant tous les acquis syndicaux du salariat (cf mon post du 1er mai 2024). Les chauffeurs ou livreurs Uber sont le parangon ultime de l'exploitation de l'homme par l'algorithme.  

  • La petite musique des start up comme modèle de gestion de l'action publique   
Sous l'éclat scintillant des géants de la tech, des entrepreneurs stars, des start up à succès, des prouesses technologiques, une petite musique montait depuis déjà au moins 10-20 ans. Les start up sont des modèles d'efficience en termes de gouvernance et font mieux que les États et les gouvernements, incarnations de l'ancien monde poussiéreu et sclérosé. Leur modèle économique est celui d'un État qui prélève des taxes sur les échanges sur la base d'une situation monopolistique (un bel exemple est booking.com qui impose 15% de frais sur toute réservation d'hotel). La cryptomonnaie permet de battre monnaie même si Facebook a renoncé à sa monnaie Libra. Leurs capacités technologiques remplacent les agences des États (la NASA ne peut plus se passer de Space X pour ramener ses cosmonautes). Leur statut diplomatique est supérieur à celui d'un État souverain quand on voit comment est reçu Elon Musk, Mark Zuckerberg, Bill Gates ou Jeff Bezos. En termes de géopolitique, en appuyant sur un bouton, Elon Musk peut supprimer les télécommunications Starlink et mettre à mal l'armée ukrainienne.  

Jusqu'à présent, tout cela était enveloppé dans une bonne conscience feinte pour "rendre le monde meilleur" et s'enrichir au delà du raisonnable au passage. Open AI était à la base une entité créee pour être non lucrative. Les services google sont pour la plupart gratuits et extrêmement performants**. Facebook a été un levier important pour les printemps arabes. Dans le monde de l'aide au développement que je connais bien, les milliardaires financent directement l'action humanitaire comme la fondation Bill et Melinda Gates qui est maintenant le premier contributeur de l'OMS. Les initiatives comme development data partnership de la Banque Mondiale permettent à ces géants de s'acheter une bonne conscience en utilisant leurs compétences pour produire de l'analyse extrêmement pertinente. Cela montre aussi que la connaissance du monde se privatise et son accès se monétise (si ce n'est pas fait aujourd'hui, ça le sera demain).  

Une traduction du potentiel du numérique que je défends est celle du service public 2.0 qui amplifie les moyens et les bénéfices de l'action et du service public. L'exemple de Direction Interministériel du Numérique  en France ou les initiatives de l'administration Obama sont des beaux exemples de remise en question proactive de l'action publique. C'est aussi pour cela que je fais la promotion des communs numériques (OpenStreetMap, Wikipedia, logiciel libre..).  

  • Nouvelle confiture dans des vieux pots boostés au numérique - le "techno féodalisme" ou "techno monarchie" comme système de gouvernance   
La montée de l'internationale populiste d'extrême droite et des dangereux néo réactionnaires tendance Victor Orban, Javier Milei, Bolsonaro et consorts nous fait entrer dans une nouvelle ère. 

Aux US, cette révolution d'extrême droite utilise l'approche start up comme mode de gouvernance des États et de l'administration en disruptant tout cadre institutionnel et citoyen. 

« Croyons les techno-monarchistes et libertariens américains lorsqu’ils annoncent vouloir se débarrasser de la démocratie »  nous rappelle Marie Charel du monde en mentionnant le texte du pseudo intellectuel, vrai néo réactionnaire glaçant, Curtis Yavin qui prône l'avènement d'un techno monarchisme d'une loi du plus fort. Les PDG de la tech sont les nouveaux barons et l'aristocratie les acteurs de la tech et détenteur du capital. La manipulation de la plèbe se fait à grande échelle, finalement facilitée par le numérique et les bulles informationnelles. La traduction en français est là. On en rirait si ce Curtis Yavin n'avait pas l'oreille des plus grands dont JD Vance, le nouveau vice président, dont l'idéologie néo réactionnaire est tout sauf un opportunisme politique (contrairement à Donald Trump qui n'a pas de colonne vertébrale à part celle de son auto promotion). J'ai d'ailleurs toujours été étonné que les grandes oeuvres de science fiction évoquent un fonctionnement féodal (Dune, Star Wars, Fondation, l'Incal etc....).   
 
C'est l'étape, assez sidérante, que nous sommes en train de vivre avec le fameux DOGE d'Elon Musk suite à l'élection de Donald Trump. À l'instar du principe de base des start up, la première étape consiste à disrupter (en bonne novlangue orwellienne pour ne pas dire démanteler) les institutions et le fonctionnement démocratique dont les bases ont été posées par les lumières. L'exécutif est tout puissant, ne rend plus compte au législatif et au judiciaire "frein à innover" (à part quand ça les arrange***). On retrouve l'approche par actions radicales et brutales du fonctionnement des start up. Les hommes et les femmes sont résumés à des données et des pions. On pivote et on itère sur des pas de temps très courts. Après avoir prêté allégeance, jouant sur l'ambivalence de leur proximité avec le pouvoir, sans lien juridique, les nouveaux barons imposent une vision du monde néo réactionnaire. Mais surtout ils éradiquent ouvertement toutes les tentatives de régulation / encadrement en supprimant à la fois la réglementation et ... ceux et celles qui doivent les mettre en œuvre avec un joyeux mélange des genres et des conflits d'intérêt. 

Dans notre monde, coupé l'accès aux systèmes d'information à un individu permet de l'euthanasier professionnellement parlant en le rendant inopérant en 1 clic (plus accès à ses mails, aux dossiers, aux communications, au badge d'entrée...). C'est la fin annoncée du service public pour aller vers des services privés censitaires. L'autre aspect est de pouvoir réaliser des autodafés numériques en effaçant les bases de données ou connaissances ouvertes. On retrouve toute la duplicité des défenseurs de freedom speech qui sont des censeurs à grande échelle. La performance est mise en avant et les "déviants" et les plus faibles écartés. Mais qui donc définit qui est performant ou déviant ? En dehors de tout contrôle démocratique, citoyen ou contre pouvoir, une poignée d'homme ont droit de vie ou de mort sociale et professionnelle sur les agents de l'administration et les politiques publiques. Pour m'être régulièrement affronté intellectuellement des chicago boys, contrairement au discours néo libéral, la notion de service public ne se résume pas à une équation financière. Heureusement jusqu'à présent, l'argent n'était pas le seul étalon mais jusqu'à quand? L'avantage est que l'on sait qui seront les gagnants ie les aristocrates du techno féodalisme et le "tiers état" manipulé à grande échelle pour faire croire qu'ils peuvent aussi accéder à l'aristocratie et que le problème est le sous tiers d'état que représentent malheureusement les migrants. 


Si le côté obscur de la force est plus facile, plus rapide, plus attrayant à court terme, le côté clair de la force ne peut pas être anéanti, voyons la suite et espérons que ce n'est qu'un effet de balancier dont l'histoire nous a habitué. 



* Je vous invite à regarder l'excellente série documentaire "Capitalisme américain - Le culte de la richesse"  sur Arte qui décrit les trois séquences i) capitalisme sauvage des Rockfellers et consort jusqu'à la grande crise de 1929 ii) régulation et émergence de l'Etat providence sous Roosevelt et à la suite de l'économie de guerre de 1939-1945 (à cette époque, le taux d'imposition atteignait 90% pour les plus hauts salaires) iii) la révolution néo libérale Reagan, la dérégulation et le retour du capitalisme sauvage dans l'épisode 3 l'émergence des géants de la tech.    

** Je suis moi même un utilisateur de google, ma vie a changé avec google earth, gmail, google docs en commençant par ... ce blog  



« Croyons les techno-monarchistes et libertariens américains lorsqu’ils annoncent vouloir se débarrasser de la démocratie » - Marie Charrel le monde 20 février 2025

https://www.lemonde.fr/idees/article/2025/02/20/croyons-les-anarcho-capitalistes-americains-lorsqu-ils-annoncent-vouloir-se-debarrasser-de-la-democratie_6555481_3232.html

Les oligarques libertariens de la Silicon Valley soutenant Trump rêvent de territoires affranchis de taxes, de réglementations, de redistribution et de solidarité, explique Marie Charrel, journaliste au « Monde », dans sa chronique.


Tout un symbole. La Bourse de Chicago, vénérable institution fondée en 1882, aujourd’hui filiale de la New York Stock Exchange, va déménager pour Dallas, au Texas, a-t-elle annoncé mercredi 12 février. Motif : le Texas est la nouvelle « place to be » (« l’endroit où il faut être ») des affaires. Depuis dix ans, plus de 300 entreprises y ont transféré leurs sièges, dont Chevron, Oracle, Toyota Motor, Hewlett-Packard Enterprise et Tesla, l’entreprise d’Elon Musk. « Nous allons devenir la capitale financière de l’Amérique », vante Greg Abbott, le gouverneur du Texas.

Les fleurons de la Silicon Valley faisant leurs valises pour the Lone Star State (« l’Etat de l’étoile solitaire ») évoquent l’abondance de la main-d’œuvre qualifiée à Austin ou Dallas, l’immobilier moins cher, mais aussi – et surtout – la faible fiscalité pour les entreprises, doublée d’un environnement réglementaire ultraléger. Il y est ainsi interdit d’imposer les revenus des individus – le Texas l’a même gravé dans sa Constitution.

Cet Etat incarne le rêve de Donald Trump et de ceux qui l’entourent, techno-monarchistes et libertariens, tels que Peter Thiel, le milliardaire cofondateur de PayPal, Elon Musk, ainsi que les autres oligarques de la tech. A savoir, un territoire où l’on s’affranchit des lois, des taxes, des réglementations environnementales, du code de la construction et du droit du travail. Un éden du business où tout est transaction.

A y regarder de près, de tels espaces sont déjà nombreux. L’historien canadien Quinn Slobodian les décrit dans son ouvrage Le Capitalisme de l’apocalypse ou le rêve d’un monde sans démocratie (Seuil, 368 pages, 25,50 euros). Depuis cinquante ans, ils se multiplient partout sur la planète. Il s’agit du Hongkong des années 1980, île probusiness dirigée par de puissants conglomérats familiaux, de Dubaï, du Liechtenstein et des autres paradis fiscaux. Il s’agit des ports francs et « zones économiques spéciales » en Pologne, en Chine, en Inde, où l’on déroule un tapis rouge aux investisseurs à coups de taxes allégés, de facilités diverses et de fiscalité anecdotique.

Le monde recense déjà plus de 6 000 de ces territoires. Les hommes d’affaires n’y sont pas encombrés par l’Etat, les juges, les syndicats. Le politique est aboli. L’antitrust inexistant. La redistribution anéantie. Tout comme la solidarité. Ils sont le fruit d’un « capitalisme à fragmentation », décrit Slobodian, où, si l’on poursuit dans cette voie, les Etats-nations s’effondreraient au profit de villes privées, gérées comme des entreprises. Des cités où tout s’achèterait, y compris l’éducation et la santé.

Le « techno-monarchisme » selon Curtis Yarvin

Dans ce monde fragmenté, sans filet de protection sociale, qui prendrait en charge les vieux et les malades ? Comment les précaires se soigneraient-ils ? Comment se formeraient ceux qui perdent un emploi car leurs qualifications ne sont plus à jour ? Que feraient de leurs enfants les mères solos souhaitant travailler si aucune aide ne le leur permet ?

Pour résoudre ce genre de problèmes, les villes privées mettront peut-être de côté les habitants insuffisamment productifs pour contribuer à leur économie. Elles les enfermeront dans des caves, agrémentées d’un casque d’intelligence artificielle les plongeant dans une vie virtuelle anesthésiante, comme dans le film Matrix. Cela vous fait sourire ? Vous avez tort. Car cette proposition émane sérieusement du blogueur américain néoréactionnaire Curtis Yarvin, très influent auprès de proches de Donald Trump, dont son vice-président, J. D. Vance. Le 18 janvier, il a détaillé sa vision d’un « techno-monarchisme » glaçant dans une interview au New York Times, traduite dans la foulée en français par Le Grand Continent.

« Quand quelqu’un vous montre qui il est, croyez-le dès la première fois », aimait répéter la poète afro-américaine Maya Angelou (1928-2014). Alors, croyons ces anarcho-capitalistes lorsqu’ils annoncent vouloir se débarrasser de la démocratie. Ils sont les ennemis du peuple. Les politiciens de droite et les chefs d’entreprise qui, en Europe et ailleurs, affichent une fascination servile pour le cocktail de déréglementations brutales qu’ils promettent sont les idiots utiles qui permettront leur sombre règne.

Le « techno-féodalisme » une expression venue de la science-fiction pour désigner la mutation du capitalisme - le monde 19 mars

https://www.lemonde.fr/idees/article/2025/03/19/le-techno-feodalisme-une-expression-venue-de-la-science-fiction-pour-designer-la-mutation-du-capitalisme_6583409_3232.html

Prenant appui sur le système de domination des seigneurs sur les serfs, ce concept décrit le pouvoir économique et politique exercé sur nos vies par les géants de la Silicon Valley. Avec comme source d’enrichissement non pas le profit, mais la rente.


Histoire d’une notion. Le féodalisme s’est éteint en Europe entre le milieu du XVIIIe siècle et le début du XIXe siècle, mais le mot a survécu. Il resurgit de temps à autre pour décrire une situation dans laquelle une puissance dominante prélève une rente sur une multitude d’individus. Par exemple, le philosophe allemand Jürgen Habermas, au début des années 1960, parlait de « reféodalisation » (« Refeudalisierung ») pour décrire l’irruption de grands groupes privés dans l’espace du débat public, notamment à travers la publicité et la consommation de masse.

Depuis quelques années, dans la littérature économique ou militante, on croise souvent l’expression « techno-féodalisme ». Intrigante car elle réunit deux termes a priori opposés, elle désigne le modèle économique sur lequel prospèrent les grandes entreprises technologiques comme Google, Amazon, Apple ou Meta. L’idée est que ces groupes tirent profit d’une rente, comme le faisaient les seigneurs à l’époque féodale.

L’économiste grec Yanis Varoufakis a adopté le concept, qui lui est désormais souvent attribué. Nommé ministre des finances en janvier 2015 dans le gouvernement de gauche formé pendant la crise de la dette publique grecque par son ami Alexis Tsipras, il avait démissionné avec fracas six mois plus tard, en désaccord avec ce dernier.


Il a publié en 2023 un livre, Techno-feudalism (paru en France sous le titre Les Nouveaux Serfs de l’économie, Les Liens qui libèrent, 2024), dans lequel il s’emploie à démontrer que le capitalisme est mort, tué et remplacé par un système pire encore. Au marché ont succédé des plateformes de vente (comme Amazon) ; et le profit a cédé la place à la rente. Quant à nous, nous sommes les nouveaux serfs : nous récoltons des données, qui vont être exploitées par les seigneurs, les maîtres des GAFA Jeff Bezos, Elon Musk et Mark Zuckerberg.

Lire aussi la tribune | Article réservé à nos abonnés Panne informatique : « Le numérique et ceux qui le maîtrisent exercent désormais une position dominante, au-delà des Etats »

A la fin du livre, dans une page de remerciements, Varoufakis rend discrètement hommage à un économiste français, membre des Economistes atterrés, Cédric Durand. Ce dernier est l’auteur d’un livre lui aussi intitulé Techno-féodalisme (La Découverte), publié en 2020. Varoufakis l’a lu, et s’en est visiblement inspiré. Durand y décrit un phénomène similaire : une logique de prédation a fait dérailler le capitalisme. Celle-ci a pris le pas sur la logique de production, ce qui a eu raison de la croissance. Les nouveaux seigneurs sont ceux qui contrôlent les données et les capacités de traitement de celles-ci. Ces données sont indispensables à la vie sociale contemporaine, comme l’était la terre au Moyen Age.

Aucun contrepoids

Durand nous présente également comme étant dans la situation des serfs d’autrefois : nous ne participons pas à la récolte du blé, mais à celle des données. Et comme nos ancêtres en servitude, nous sommes attachés au fief : si nous fuyons, nous perdons toute vie sociale. Enfin, comme dans la féodalité médiévale, politique et économie ne font qu’un. « Autrefois, le seigneur percevait les productions agricoles, faisait la loi, surveillait ses serfs. Il en est de même dans le système techno-féodal : les techno-seigneurs tirent un revenu des données collectées, tout en fixant des règles qui organisent notre vie sociale », explique Durand.

L’expression « techno-féodalisme » lui est venue grâce à un jeu de rôle sur fond de science-fiction, sorti en 1988, Cyberpunk, explique-t-il. Le techno-féodalisme y décrit l’attitude de firmes géantes et coalisées, arrachant aux travailleurs la promesse de service et de loyauté en échange d’une protection. Il n’existe face à elles aucun contrepoids, leur puissance excède celle des Etats. « Il en découle une marginalisation de la figure des citoyens au profit de celle des parties prenantes (actionnaires, travailleurs, clients, créditeurs) liées à l’entreprise », écrit l’économiste. En tombant sur cette dystopie de la fin des années 1980, il n’a pu s’empêcher de noter « l’actualité de certaines des intuitions formulées dans cet imaginaire ».

Une troisième chercheuse revendique la maternité de l’idée de féodalisme appliquée aux GAFA : l’Italo-Américaine Mariana Mazzucato, professeure d’économie à l’University College de Londres. Elle s’est fait connaître par plusieurs brillants essais, publiés en France chez Fayard : L’Etat entrepreneur (2020), Mission économie (2022)… Le 2 octobre 2019 (juste avant le livre de Cédric Durand, donc), elle avait rédigé pour Project Syndicate un article intitulé « Prévenir le féodalisme numérique ». Elle y soulignait elle aussi l’anomalie du modèle des plateformes numériques : « Tout comme les propriétaires fonciers du XVIIe siècle tiraient des rentes de la hausse des prix des terres, et tout comme les barons voleurs profitaient de la rareté du pétrole, les entreprises de plateformes d’aujourd’hui extraient de la valeur en monopolisant les services de recherche et de commerce en ligne », écrivait-elle.

Les économistes qui comme Varoufakis, Durand ou Mazzucato manient la notion de « techno-féodalisme » ou de « féodalisme digital » sont les mêmes qui appellent à réglementer l’économie numérique. A l’heure de la tronçonneuse du président argentin Javier Milei et de la fureur anti-bureaucratique d’Elon Musk, ils semblent ramer à contre-courant d’une vague qui s’autodésigne comme libérale. Pourtant, lorsqu’elle vise l’activité des grands groupes numériques, la réglementation n’est pas forcément l’ennemie de la liberté économique, au contraire. Après tout, comme le rappelait Mariana Mazzucato dans son article, l’idéal de « marché libre » que nourrissait le célèbre économiste Adam Smith (1723-1790) était un marché « libéré des rentes, pas de l’Etat ».

Pascal Riché

lundi 17 mars 2025

El Seed

Très belle découverte à la Pirelli HangarBicocca à Milan. Le lieu est gigantesque, l'architecture dépouillée. 

photo du site internet 
photo personnelle

El Seed,  artiste franco tunisien qui manie le graff et la calligraphie. La fresque est magnifique. Mais j'avoue que j'ai été surtout intéressé par un livre "perception" sur son oeuvre du Caire qui retrace l'histoire de la création et dans laquelle j'ai retrouvé l'atmosphère si particulière des quartiers extrêmement populaires du Caire (le quartier des chiffonniers).  

 




 









 







Bosco Verticale Milan Stefano Boeri


Photos personnelles (il pleuvait et c'était pas le printemps encore)

 

"Le « bosco verticale » (littéralement « bois vertical » en français) est un complexe architectural conçu et porté par Stefano Boeri avec l'aide d'horticulteurs et de botanistes1. Constitué de deux tours d'habitations hautes respectivement de 76 mètres et de 110 mètres, il répond à un projet de renouvellement urbain du quartier milanais de Porta Nuova à Milan en Italie.

Ces deux tours expérimentent de nouvelles formes d'intégration écopaysagère du bâtiment, et d'intégration de la biodiversité dans le bâti. Inaugurées en 20142, elles contiennent de nombreux arbres, arbustes et plantes vivaces répartis en façade sur les différents niveaux. Ce projet de reforestation verticale a pour objectifs d'augmenter la biodiversité, de réduire l'expansion urbaine et de contribuer à la régulation du microclimat." extrait wikipedia 

 


Sur le site de l'agence de Stefano Boeri