samedi 16 janvier 2016
dimanche 10 janvier 2016
Appel à une primaire pour la gauche (et surtout une élévation du débat politique)
«Nous refusons la passivité face à l’abstention, au vote Front national et à la droitisation de la société. Nous refusons les renoncements face aux inégalités sociales, à la dégradation environnementale, aux discriminations et à l’affaissement démocratique. Nous refusons la paralysie de nos institutions.
«Nous n’acceptons pas que la menace du FN, le risque terroriste et l’état d’urgence permanent servent de prétexte pour refuser de débattre des défis extraordinaires auxquels notre société est confrontée. Il n’y a pas de fatalité à l’impuissance politique. La France est riche de son énergie vitale et de ses talents qui aspirent à forger un avenir bienveillant. Nous voulons faire de la prochaine élection présidentielle la conclusion d’un débat approfondi qui est passionnément désiré et attendu dans le pays.
«Nous voulons du contenu, des idées, des échanges exigeants. Nous appelons à une grande primaire des gauches et des écologistes. Notre primaire est la condition sine qua non pour qu’un candidat représente ces forces à l’élection présidentielle en incarnant le projet positif dont la France a besoin pour sortir de l’impasse. Elle est l’opportunité de refonder notre démocratie. En signant cet appel, je m’engage à voter lors de la primaire des gauches et des écologistes. Je participerai dans la mesure du possible aux débats qui seront organisés pour la nourrir. Signez et faites signer, pour réanimer le débat politique, pour se réapproprier l’élection présidentielle, pour choisir notre candidat-e !»
Pour signer et faire signer l'appel, rendez-vous sur le site notreprimaire.fr
Victor Hugo 1870
« Les paroles me manquent pour dire à quel point m’émeut l’inexprimable accueil que me fait le généreux peuple de Paris.
Citoyens, j’avais dit : Le jour où la république rentrera, je rentrerai. Me voici.
Deux grandes choses m’appellent. La première, la république. La seconde, le danger.
Je viens ici faire mon devoir.
Quel est mon devoir ?
C’est le vôtre, c’est celui de tous.
Défendre Paris, garder Paris.
Sauver Paris, c’est plus que sauver la France, c’est sauver le monde.
Paris est le centre même de l’humanité. Paris est la ville sacrée.
Qui attaque Paris attaque en masse tout le genre humain.
Paris est la capitale de la civilisation, qui n’est ni un royaume, ni un empire, et qui est le genre humain tout entier dans son passé et dans son avenir. Et savez-vous pourquoi Paris est la ville de la civilisation ? C’est parce que Paris est la ville de la révolution.
Qu’une telle ville, qu’un tel chef-lieu, qu’un tel foyer de lumière, qu’un tel centre des esprits, des cœurs et des âmes, qu’un tel cerveau de la pensée universelle puisse être violé, brisé, pris d’assaut, par qui ? par une invasion sauvage ? cela ne se peut. Cela ne sera pas. Jamais, jamais, jamais !
Citoyens, Paris triomphera, parce qu’il représente l’idée humaine et parce qu’il représente l’instinct populaire.
L’instinct du peuple est toujours d’accord avec l’idéal de la civilisation.
Paris triomphera, mais à une condition : c’est que vous, moi, nous tous qui sommes ici, nous ne serons qu’une seule âme ; c’est que nous ne serons qu’un seul soldat et un seul citoyen, un seul citoyen pour aimer Paris, un seul soldat pour le défendre.
A cette condition, d’une part la république une, d’autre part le peuple unanime, Paris triomphera.
Quant à moi, je vous remercie de vos acclamations mais je les rapporte toutes à cette grande angoisse qui remue toutes les entrailles, la patrie en danger.
Je ne vous demande qu’une chose, l’union !
Par l’union, vous vaincrez.
Etouffez toutes les haines, éloignez tous les ressentiments, soyez unis, vous serez invincibles.
Serrons-nous tous autour de la république en face de l’invasion, et soyons frères. Nous vaincrons.
C’est par la fraternité qu’on sauve la liberté. »
samedi 9 janvier 2016
« La crise des valeurs favorise les théofascismes »
LE MONDE CULTURE ET IDEES | • Mis à jour le | Propos recueillis par Julie Clarini
Ces mouvements fonctionnent avec les mêmes ressorts profonds et les mêmes opérateurs d’embrigadement que les fascistes. Hannah Arendt a montré que les nazis et les fascistes avaient emprunté aux mafias américaines leurs méthodes d’intimidation, et à la publicité hollywoodienne son dispositif de propagande. C’est la même chose avec Daech [acronyme arabe de l’EI].
Quant à la mort subjective, je vais prendre un exemple issu de la clinique du docteur Adnan Houbballah, qui a vécu la guerre civile au Liban. Il avait pour patiente une jeune fille venue en consultation après un viol collectif, qui s’était complètement séparée de son corps. Elle est ensuite entrée dans la guerre et la haine au point d’offrir son corps, qui ne lui appartenait plus, à ses camarades de combat. Il y avait là un cas typique de dissociation. Les tireurs de masse qui ont agi le 13 novembre sont dans une dissociation comparable : ce sont des automates, des instruments, qui tuent avec ce qui est déjà mort en eux.
L’islamisme terroriste est un mode d’emploi du quotidien, une politique autant qu’une norme de vie. Quand vous avez des individus désorientés, qui n’arrivent pas à trouver de réponse aux questions qu’ils se posent, une telle offre peut s’avérer alléchante. C’est pourquoi il s’agit moins de croire que de pratiquer. Les prescriptions comptent davantage que la foi.
Ce que l’on constate dans la clinique, c’est la souffrance de gens qui sont extrêmement seuls : l’autonomie présentée comme émancipation se révèle une profonde solitude. Ils sont en manque de liens, de soutiens. Les « amis » des réseaux sociaux incitent à transformer les moments de l’existence en spectacles et en marchandises. Bref, on assiste à un jumelage insidieux entre la vision néolibérale du monde et une autre conception, « théofasciste ».
Cette externalisation des services de l’Etat, prônée par le néolibéralisme, a permis que ces domaines tombent dans des mains partisanes. C’est par ce biais que les islamismes radicaux, en Europe et au Maghreb, mais aussi ailleurs, trouvent des occasions de mobiliser au-delà de la religion, pour se transformer en idéologie politique, sociale et culturelle.
Ces mouvements néofascistes rassemblent de manière rhapsodique tous les mécontentements, toutes les frustrations, tous les opportunismes. Par exemple, ils permettent à des entrepreneurs de l’horreur, pour beaucoup issus de l’ancienne armée irakienne, de faire des affaires. C’est une espèce de bricolage. Souvenez-vous de la déclaration de Mussolini dans Il Popolo d’Italia en 1919 : « Nous nous permettons le luxe d’être aristocrates et démocrates, conservateurs et révolutionnaires, légalistes et illégalistes, suivant les circonstances de temps, de lieu et de milieu. » Vous retrouvez ce que dit Hannah Arendt, le totalitarisme, c’est : « Tout est possible ».
Ces mesures sont nécessaires mais aucunement suffisantes. Il nous faut revoir intégralement notre vision néolibérale de la politique. Nous avons laissé le système technicien et marchand penser et gouverner à notre place. Nous devons rétablir une démocratie confisquée par le néolibéralisme. Face à des fascismes qui se prévalent de la religion et de la morale, nous devons cesser de concevoir la valeur sur l’étalon marchand et juridique. N’oublions pas que la normativité nazie s’est installée par la critique de ces conceptions abstraites et financières de la valeur.
Nous devons, à l’inverse, impérativement relever le défi de la modernité en permettant, par la culture, l’information, l’éducation et le soin, de relier le passé, le présent et l’avenir. Non pas, comme le Front national, en retournant vers des entités traditionnelles ou des valeurs du passé, mais en misant, comme Albert Camus, sur l’éternelle confiance de l’homme dans le langage de l’humanité.
« L’Individu ingouvernable », de Roland Gori (Les Liens qui libèrent, 352 p., 22,50 €).
En savoir plus sur http://www.lemonde.fr/societe/article/2015/12/31/la-crise-des-valeurs-favorise-les-theofascismes_4840241_3224.html#GcKS5QTtmeJuuGBw.99